Victoire, étudiante en Service Civique

- Du coup, c'est bon pour moi. Pas mal, on a presque fait un camembert.

- C'est bon le camembert.

- C'est très bon le camembert. Je suis d'accord.

- Une baguette bien chaude. Avec un camembert.

"Je m'appelle Victoire, je suis en troisième année de médecine et je profite d'une césure pour faire mon Service Civique."

- Michel, je te les prend tous ? Dis-moi. Attends, juste, on va juste pousser les cafés. Ce sont lesquels qui te manquent ?

"Y avait des livres Harry Potter. Du coup, je vais lui montrer, il aime bien Harry Potter, il pouvait en prendre un ou deux. Il voulait tout prendre."

- Septième ! On fait quoi maintenant ? Il te faut lesquels ? Tu as besoin desquels ?

- Surtout, après, je suis allée à sa maison de retraite et ils m'ont dit qu'ils lui en avaient acheté l'autre jour.

- Il a combien de livres Harry Potter ?

- Il a tous les exemplaires.

- S'il faut les acheter, je te les achète. Il faut que tu me dises lesquels il te manque.

- Tout.

- Tout ? Mais t'en as plein des livres Harry Potter dans ta chambre... Il ne te les manque pas tous. Je ne le prends pas. Celui-là tu ne le prends pas. Oui mais pas maintenant Michel, il faudra qu'on revienne.

"Michel, il est sous tutelle. Je savais pas trop quel était mon cadre. Je ne pouvais pas vraiment dire : "Non, Michel t'achètes pas". Je ne peux pas lui interdire d'acheter ses livres. C'est pas possible. En même temps, je n'avais pas envie d'être responsable de Michel qui dépense plein d'argent d'un coup alors qu'il est sous tutelle."

- Ah donc t'en as sur toi des sous. Du coup, tu veux t'acheter un livre ou pas ?

- Oui, je les achète.

- Pas tous peut-être... mais un.

- Michel, tu ne peux pas tout acheter là. Là maintenant, tu veux t'acheter un livre ou pas ? Tu veux louer les livres ? Ici, on ne peut pas louer les livres. Michel écoute-moi, ici on ne peut louer les livres, il faut acheter les livres. Je t'apporte un livre là. Je t'en apporte un déjà. Et la semaine prochaine, on retourne ici ensemble et on prend un autre livre. Je prends tout. Tous encore ?!

- Trois.

- Trois, d'accord.

"Michel, mets tes pieds sur le cale-pied."

"Tu veux lesquels ? Regarde. Trop mim's. Attention. Merci Michel. Voilà ! On est bons. Je vais te garder en arrière comme ça, on va faire les pavés plus facilement. OK, alors là Michel, c'est la grande aventure."

- Salut !

- Allez, on est bons. T'es prêt ? OK, ça va aller.

"Je pense que je n'avais vraiment pas assez d'affirmation de moi-même durant mes stages. Si j'étais devenue externe maintenant, je ne pense pas que c'était le bon moment."

- L'hôpital c'est pas forcément un endroit qui incite à s'affirmer soi-même.

- En vrai, je pense que c'est bien parce que ça t'a mis dans un environnement où t'as pu te trouver un peu et trouver ta place, tu sais de quoi t'es capable, tu sais comment t'affirmer.

- Globalement par rapport au début de l'année ça n'a rien à voir.

"Ça va ? Je m'en vais, je viens, je pars. Au fil des saisons. Salut !"

"Ils sont totalement exclus de la société. On les intègre pas et c'est hyper problématique. Tout se fait sur internet maintenant. Comment ils font, eux ? Ils savent pas faire."

"Je m'appelle Victoire, je suis en troisième année de médecine et je profite d'une césure pour faire mon Service Civique."

"J'appuie sur le micro. Si tu veux envoyer un message vocal, tu peux appuyer sur le micro ou alors tu peux taper avec le clavier."

- Je ne sais pas bien m'en servir du clavier.

- Tu veux m'envoyer un message vocal ? Ok alors vas-y. Il faut que tu appuies longtemps, du coup, tout le temps où tu parles. Ca enregistre là si tu veux.

- Je suis contente que tu viennes chez moi.

- Attends. Alors là, ce qui s'est passé, c'est que tu as lâché le doigt juste après avoir toussé. Et du coup, quand tu as parlé, ça n'a pas enregistré. Il fallait garder le doigt tout le long où tu parles.

- D'accord.

- Donc pour supprimer, tu cliques sur la croix. Alors on refait.

- Je suis contente que tu viennes chez moi.

- J'enlève mon doigt ?

- Super. Et après la petite enveloppe, là, pour envoyer.

"Agnès, c'est avec elle que j'ai fait le prototype. C'est parti d'Agnès à l'atelier numérique avec elle où je lui fais une fiche récap de tous les points avec explications. Et elle qui me dit qu'elle sait pas lire mon écriture."

- D'où la naissance du projet.

- Du coup, je me suis dit que j'allais lui faire un petit manuel. Mais en fait, après, je me suis rendu compte qu'ils avaient la distribution des téléphones, donc que j'allais faire un manuel pour de vrai avec les bases un peu parce que c'est bien de donner un téléphone, mais s'ils savent pas s'en servir...

- Ouais, c'est chaud.

"Je clique sur la croix."

- Alors déjà ouvrir le message du coup de 38 656, on est dessus. Première chose. C'est bon, ça c'est fait. Ensuite, soit t'écris avec le clavier, soit dictée vocale.

- Dictée vocale.

- C'est parti, dictée vocale Agnès.

- Je n'ai plus de problème actuellement. J'espère que ça continuera. Merci.

- Il faut cliquer à la fin pour arrêter.

- Et là, c'est bon, c'est envoyé ?

- Alors pas encore. Déjà on va fermer le clavier en appuyant sur la flèche du bas. Parfait. Ensuite, suivant. Parfait, ton message est envoyé.

- Victoire

- Thomas

- Ça fait combien de temps ? Ça fait quatre mois.

- Oui et du coup ça fait cinq mois maintenant.

- Bilan à mi-parcours un peu en retard.

- C'est pas grave

- Quand on aime, on ne compte pas. Alors qu'est-ce que tu as appris ?

- Alors qu'est-ce que j'ai appris ? Il y a eu une formation pour la relation, l'accompagnement, l'écoute et le transport de personnes à mobilité réduite. C'était sur nous aussi, on a appris plein de choses sur nous quand même, parce qu'il y a des personnes à accompagner. On a appris à les accompagner, d'accord, mais nous connaître mieux au travers de l'accompagnement, ça aussi, on l'a fait. En fait, on le fait tout le temps.

Donc voilà, j'ai appris sur les gens, j'ai appris, au niveau psychologique, on apprend pas mal de choses quand même mais sur nous, c'est hyper intéressant. Je trouve que ça donne confiance en soi, donc c'est cool. J'ai appris à plus m'imposer qu'avant.

- Le beffroi.

- Ah oui, oui, on le voit bien en plus. En fait, tu vois tout, c'est génial.

- Et là, c'est Euralille.

- OK, mais vraiment je pense que ce serait bien si on allait sur ton balcon et qu'on buvait un café sur ton balcon.

- T'as envie d'aller sur le balcon ?

- Peut-être pas là tout de suite, sauf si toi t'as envie. C'est toi qui décides.

- Moi, j'ai un peu le vertige

- Ah, t'as le vertige ? Je comprends que t'aies le vertige, si tu regardes en bas. C'est hyper haut en fait.

- Oui c'est le dixième étage.

- Oui. En fait je n'avais pas réalisé. Quandqu'on voit comme ça, ça va. Mais quand on penche la tête et qu'on regarde en bas, c'est différent.

"Comme je n'ai pas du tout de famille, je ne peux mettre aucun numéro de téléphone de proche, je n'en ai pas du tout. C'est gai."

- Là-dedans, vous pouvez mettre du coup vos dernières volontés.

- Ah oui ?

"Je m'appelle Victoire. Je suis en troisième année de médecine et je profite d'une césure pour faire mon Service Civique.

"De toute façon, imaginons que vous disparaissez. Les petits frères des pauvres s'inquiéteraient quand même.

- Oui, voilà, il n'y a qu'eux qui s'en inquiéteraient.

- Il y a des gens qui vous chercheraient en tout cas.

- Mais combien de temps après ?

- Moi déjà, toutes les deux semaines.

- Je fais régulièrement tous mes dépistages sur les maladies possibles à la cinquantaine.

- OK, je le mets.

- Tous les dépistages.

- C'est bien.

- Alors oui, moi je suis comme ça.

- Bravo !

- Pourquoi, Victoire, vous ne seriez pas comme ça ?

- C'est vrai qu'avoir une régularité c'est important.

- Sinon c'est des maladies. Je mange pauvrement et je fais du sport. Je fait tout pour essayer d'avoir le moins de maladies possibles.

- Vous m'aviez dit la dernière fois que vous mangez très bien. Et ça, c'était différent de moi parce que moi, je mange très mal.

Ma chaussure, elle est là. Voilà.  Alors,  pourquoi je la mets ? Parce que comme j'ai mon pied qui se relève pas bien à cause de mon handicap. Eh bien, j'ai ça parce que ça m'aide à relever le pied. C'est pour ça que l'autre, je n'en ai pas besoin parce qu'au piano, il y a des pédales.

- Mais après, vous marchez de mieux en mieux quand même.

- Surtout ces jours ci, ma jambre droite récupère bien parce que j'ai plus d'appui dessus, donc j'ai moins peur. Par contre, je n'ai pas peur de jouer du piano.

"Restez loin."

- Je vais là-bas. Joriane, c'est bien. Vous avez progressé encore.

"Je pense pas que je vais quitter l'asso l'année prochaine parce qu'en vrai, cette ambiance-là et tous ces gens... Ca me manquerait en fait quelque part.

- Tu sais, j'ai l'impression que ça te fait du bien.

- T'adores en parler.

"On peut peut-être aller un peu plus vite."

- Prenez votre temps quand même.

- Moi je fais exprès de faire de grandes enjambées parce que ça fait partie de ma rééducation. J'apprends la vitesse parce que marcher, ce n'est pas que marcher. Marcher, ça veut dire marcher vite et longtemps sinon c'est pas remarcher.

- Mais ça va venir.

- J'essaie d'aller un peu vite.

- Il y a deux ans, vous étiez en fauteuil roulant. C'est dingue de remarcher après ça.

- C'est vrai c'est dingue. Avoir été en fauteuil roulant pendant un an puis remarcher comme ça.

- C'est assez ouf.

- Quand je suis à côté de quelqu'un, je marche plus vite.

- Vous vous rappelez la première fois qu'on s'est rencontrées, la première chose qu'on a faites Joriane c'était avec Alexa, on s'est baladées dans votre parc.

- Ah oui, je me souviens.